Nous sommes parties à la rencontre d’Anne-Catherine et son mari Yannick. Leur souhait le plus cher ? Devenir parents. Un souhait qui se révèle être un vrai défi. Après une année sans tomber enceinte naturellement, ils passent tous les deux des examens qui marqueront le début d’un long protocole de PMA entre inséminations et FIV.
Parce que ce terme et ce qu’il englobe n’est pas forcément évident à comprendre, nous avons demandé au Dr Fabien Murisier, biologiste spécialiste de la fertilité et directeur du CPMA de Lausanne de nous éclairer.
La PMA veut dire Procréation Médicalement Assistée et a pour but d’aider les couples ayant des difficultés à avoir un enfant pour X ou Y raisons.
La PMA propose plusieurs solutions pour les problèmes d’infertilité :
- La stimulation hormonale pour favoriser l’ovulation. Les couples auront des rapports sexuels normaux.
- L’insémination intra utérine dans le cas où le nombre de spermatozoïdes ou leur mobilité n’est pas suffisant. Dans ce cas, Monsieur va donner un échantillon de sperme et le gynécologue va venir l’inséminer in-utéro pour que la fécondation ait lieu dans le corps de la femme.
- La FIV – Fécondation In Vitro où les ovules et les spermatozoïdes sont mis en contact en laboratoire puis, quelques jours plus tard l’embryon est inséminé in-utero. Elle peut également être associée à l’extraction microchirurgicale de spermatozoïdes du testicule (TESE) et à l’injection intracytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI), que nous évoquerons dans le récit d’Anne-Catherine.
Des termes compliqués, des protocoles qui font peur mais qui permettent à des couples de devenir parents alors que les astres n’étaient pas forcément de leur côté. Pour Anne-Catherine et son mari, la PMA et plus précisément l’ICSI est leur seule chance de réaliser leur rêve de devenir parents.
Découvrez la story sincère et touchante d’Anne-Catherine qui nous fascine par tant de courage et de détermination !
Anne-Catherine, peux-tu te présenter en quelques mots ?
J’ai 31 ans et suis née en France, mais mes deux parents sont suisse-allemands. Je suis la cadette d’une fratrie de 4 enfants. A 18 ans, j’ai eu envie de revenir dans mon pays d’origine et me suis installée à Genève pour mes études. J’ai fait un bachelor en psychologie puis un master en logopédie/orthophonie. Il y a 9 ans, j’ai rencontré Yannick qui est aujourd’hui mon mari depuis 5 ans.
Avez-vous toujours eu envie, Yannick et toi, de fonder une famille ?
Oui ! On en a d’ailleurs parlé ouvertement au tout début de notre relation. C’était important de savoir qu’on avait tous les deux les mêmes projets. Je lui ai partagé que je rêvais depuis toujours d’avoir des enfants : mon instinct maternel s’est révélé dès l’enfance (sourire). Je passais des heures à jouer avec ma poupée que j’emmenais absolument partout. Mon mari aussi avait envie de fonder une famille (ouf !) depuis longtemps. Cela a également toujours fait partie de ses rêves.
Au bout de combien de temps, voyant que tu ne tombais pas enceinte, avez-vous décidé de consulter ?
Une année après notre mariage, nous avons arrêté le moyen de contraception que nous utilisions. Au bout de 6 mois, j’ai commencé à trouver bizarre de ne pas tomber enceinte. J’avais beaucoup de copines autour de moi qui étaient tombées enceintes assez rapidement et je m’attendais à ce que ce soit pareil. Déjà là, j’ai commencé à m’inquiéter. Ma gynéco a été très compréhensive et rassurante ; elle m’a conseillé de prendre de l’acide folique (complément à prendre d’ailleurs quelques mois avant de vouloir avoir des enfants si jamais) et demander d’attendre encore 6 mois. Au bout d’un an, nous sommes retournés la voir. Nous avons fait un bilan complet de fertilité : un bilan sanguin (chacun), un examen des trompes et une échographie pour moi. Pour lui, c’était un rendez-vous chez un urologue et un spermogramme.
Quels ont été les résultats ?
A ce moment-là, les résultats ont montré une infertilité d’origine plutôt masculine. On nous a donc orientés vers l’insémination artificielle. Après un temps de réflexion, nous avons eu finalement la possibilité d’en faire trois durant la deuxième et troisième année « d’attente » qui, n’ont malheureusement pas abouties. Entre chaque tentative, nous avons fait des pauses pour nous reposer et prendre du recul.
Comment as-tu vécu ces premières étapes de PMA ?
Lors de la quatrième insémination, j’ai fait une hyperstimulation ovarienne. Lors des 3 premières stimulations, j’avais toujours réagi de manière assez forte au traitement hormonal. Mais pour la 4e, nous avons décidé de changer de traitement ; j’y ai fortement réagi. Tout a été arrêté du jour au lendemain car mon corps produisait beaucoup trop de follicules. Cela a été un choc pour moi et un nouvel échec. Nous avons décidé de faire une pause, de laisser passer l’été et de refaire une tentative en automne. Mais après l’été, je me sentais découragée à l’idée de refaire un traitement. J’ai commencé à me sentir mal physiquement et psychologiquement. Je voulais tellement être enceinte que je ressentais tous les symptômes comme si je l’étais. Ma gynécologue m’a très justement adressée au Dre Emery, médecin en psychosomatique au CPMA de Lausanne spécialisée en accompagnement psychologique. Elle a été d’une aide précieuse pour tenir moralement pendant ce parcours du combattant.
J’y suis d’abord allée seule, puis ensuite avec Yannick. Ensemble, nous avons fait un bilan de notre couple et de notre projet bébé. Nous avons réalisé à quel point il est important de bénéficier d’un accompagnement psychologique lors de nos démarches de PMA. Quelle bienfaisance de pouvoir poser nos questions tranquillement et de prendre le temps de faire le point sur notre parcours. Finalement, en discutant ensemble, nous avons pris conscience que j’étais physiquement et psychologiquement à bout après ces deux ans de traitement. Je n’allais pas bien : cela faisait des mois que je m’étais réfugiée dans un hyperactivisme, en remplissant mon temps par un maximum de choses, pour éviter d’être confrontée à mes émotions. Je m’étais créé un barrage émotionnel pendant les trois dernières années de PMA. J’avais serré les dents, sans prendre le temps de prendre soin de ce que je vivais intérieurement : épuisée et déprimée.
Dre Emery m’a envoyé vers ma médecin généraliste. Elle m’a mise en arrêt deux semaines qui se sont prolongées. Pour finir, j’ai fait une pause professionnelle de 4 mois. Je n’ai pas tout de suite compris ce qui m’arrivait. Je n’avais plus de recul sur rien et me sentais juste vide, fatiguée d’essayer et fatiguée d’espérer. Parallèlement, j’ai pu commencer un suivi individuel avec une psychologue qui a l’habitude d’accompagner des personnes avec des problèmes de fertilité. Du coup, nous avons alors décidé de mettre le projet bébé sur pause et cela a duré une année avant que je me sente de nouveau prête pour la PMA.
Comment Yannick voit-il tout ça ?
Avant que l’on se rencontre, Yannick n’avait jamais vraiment été en couple. Il avait longtemps attendu la femme de sa vie, et cela a été très long pour lui (il avait 31 ans quand on s’est rencontrés). Cette période lui a appris d’une part à apprécier le couple dans toute sa plénitude et d’autre part de prendre conscience que certains rêves prennent du temps à se réaliser. Il se réjouit de la perspective de devenir père un jour, et reste confiant et positif. Il n’a pas été facile pour lui de me voir mal physiquement lors des traitements hormonaux sans trop pouvoir m’aider.
Après cette pause, vous avez décidé de recommencer ?
Nous sommes retournés voir notre gynéco et avons fait la conclusion qu’à ce stade, une FIV serait la meilleure prochaine option pour nous. Dre Emry nous a donc orientés vers un centre de PMA.
Nous avons alors commencé le traitement de stimulation ovarienne. C’était de nouveau des injections d’hormones tous les soirs à 21h30 pendant toute la durée d’un cycle. Cette fois-ci, le procotcole était plus complexe, j’avais plus d’injections à faire. Mais l’équipe du CPMA est top : ils ont bien pris le temps de tout nous expliquer. Tous les 2-3 jours des 10 premiers jours du cycle de la stimulation, j’avais rendez-vous pour faire une échographie et une prise de sang. Un suivi sérieux et précis qui m’a tout de suite mise en confiance.
Comment avez-vous jonglé entre le travail et les multiples examens ?
C’était quasi impossible : c’est pour cela que j’ai posé 2 semaines de vacances. Yannick, lui, a veillé à avoir moins de travail pendant ce temps pour pouvoir se libérer. Il a pu venir à la plupart des rendez-vous, car c’était un projet de couple qu’on voulait vivre un maximum les deux ensemble. Ce qui me faisait le plus peur, c’était la ponction d’ovocytes. Il faut dire que je n’ai jamais été opérée et que ça allait être ma première anesthésie générale. Au final, ça s’est bien passé. Durant l’après-midi, la biologiste nous a appelé pour nous dire combien d’ovocytes avait été ponctionnés et combien étaient « utilisables ».
“Sometimes you have to let go of the picture of what you thought life would be like and learn to find joy in the story you are actually living.”
Rachel Marie Martin
Concrètement, comment se passe la suite ?
Les ovocytes ont été ensuite acheminés au laboratoire et mis en fécondation par FIV ou par ICSI (le spermatozoïde est placé directement à l’intérieur de l’ovocyte).
Les ovocytes restent ensuite sous observation trois à cinq jours le temps de se développer en embryons. Au bout d’une interminable attente, on nous a appelés pour nous dire combien d’embryons avaient évolué favorablement. Normalement, si tout va bien, le transfert se fait tout de suite mais dans mon cas cela n’a pas été possible car je faisait, à nouveau, une hyperstimulation. C’était frustrant, mais les professionnels du CPMA m’y avait préparé. Nous avons donc congelé le peu d’embryons prélevés et nous attendons que je me remette physiquement pour faire le transfert.
Qu’est-ce qui est le plus difficile pour toi dans cette aventure ?
D’un point de vue physique, j’ai eu du mal a supporter les effets secondaires des traitements : les nausées, la fatigue extrême, une hypersensibilité, le ventre hyper enflé et douloureux (en lien avec l’hyperstimualation). Tu as tous les symptômes d’un début de grossesse (apparemment…) sauf que tu sais que tu ne l’es pas…
Émotionnellement, c’est l’attente d’avoir un enfant qui est difficile. On se sent comme spectatrice de sa vie. On voit les autres avancer, concrétiser leurs projets moi j’ai l’impression d’être comme bloquée à une étape sans pouvoir aller à la suivante.
Auprès de qui trouves-tu du soutien au quotidien ?
Ma famille, mes amis, mon mari qui est un roc et ma foi en Dieu. Je trouve aussi du réconfort dans le sport. J’ai besoin de ma dose quotidienne pour me vider la tête !
Quel est l’impact de votre parcours PMA sur :
- Ton couple : cela nous a beaucoup rapprochés et solidifiés. On a dû apprendre durant cette épreuve à parler ouvertement de nos peurs, de nos doutes, de nos joies et de nos peines. C’est une épreuve qu’on vit à deux.
- Ton travail : il est difficile de jongler avec les rendez-vous médecins et les absences. Je n’ai rien voulu dire à mon employeur, mais il faut réussir à gérer les contraintes du travail et le timing de la biologie ! Au début, je calais simplement « insémination » dans mon agenda comme si c’était un simple examen de routine. Mais après mon épuisement émotionnel, j’ai appris à me laisser du temps pour me préparer et me reposer lors de la PMA. J’ose maintenant poser des jours de congé quand je sens que j’en ai besoin pour un rendez-vous, examen ou intervention importante !
- Ta vie sociale : j’ai souvent annulé à la dernière minutes des soirées parce que je me sentais pas bien moralement ou physiquement en lien avec les injections. Mais aussi parfois parce que je supportais pas d’être avec mes amies enceintes ou avec des enfants. C’est pas contre elles, mais par moments on avait juste besoin de se protéger.
- Toi : la culpabilité ! J’ai très mal vécu les stimulations. Je me sentais coupable de ne pas réussir à produire naturellement les hormones pour tomber enceinte et même les artificielles ne marchaient pas. On ne comprend pas ce qui cloche chez nous.
- Votre porte-monnaie : il faut savoir que 3 inséminations sont prises en charge mais que la FIV est à notre charge soit environ 10’000 CHF. C’est un coût qui demande des sacrifices. Nous avons vraiment eu la chance d’avoir nos familles respectives qui nous soutiennent généreusement dans cette démarche.
Est-ce que vos proches sont au courant ?
On leur a expliqué au bout d’un an. On en avait marre d’entendre à peine mariés « alors, à quand un baby ? ». Cette pression sociale est compliquée à gérer. L’avoir dit est une bonne chose car on peut en parler mais cela crée aussi des malaises. Mes amies n’osaient plus m’annoncer leur grossesse et montrer leur joie. Ma douleur ne m’empêche pas de me réjouir pour mes proches. Je suis tellement contente qu’elles ne doivent pas vivre ce que nous traversons. Mais en même temps, il y toujours une petite voix au fond de moi qui se dit tristement « et moi ? Pourquoi chez nous c’est si compliqué ? ».
On a toutes une amie ou une connaissance qui a de la difficulté à tomber enceinte. Comment lui montrer notre soutien ? Quoi dire et surtout ne pas dire ?
On a surtout besoin d’empathie et de compréhension. J’apprécie quand mes amies me demandent sincèrement comment je vais. J’ai été touché de recevoir par exemple d’une amie une petite attention pour la Fête des Mères. J’apprécie dans des moments où j’ai pas le moral qu’elles me demandent : « qu’est ce que je peux faire pour t’aider ? ». Ce dont j’ai besoin c’est de petites attentions, de la compassion, de l’écoute..
Par contre, s’il vous plait… Arrêtez de nous raconter ces histoires de couples qui ont attendu des années, fait pleins de traitements en PMA puis, au moment où ils ont arrêté et décidé d’adopter, elle est tombée enceinte naturellement. Cette histoire je l’ai entendu des centaines de fois déjà…Perso, je connais des couples qui ont tout arrêté et qui n’ont pas eu d’enfants aussi. Ca ne fonctionne pas toujours. La vraie vie n’est pas toujours un conte de fée.
Et s’il y a bien une phrase à bannir c’est : « lâche prise ! Arrête d’y penser et ça va marcher ». Ca ne nous aide absolument pas. Comment faire pour lâcher prise et arrêtez d’y penser avec tous les rendez-vous médicaux et traitements à faire ? Est-ce que vous arrivez facilement à lâcher prise sur les choses dont vous rêvez ? Cette phrase est ultra culpabilisante !
Anne-Catherine, une citation qui te donne du courage ?
Une copine m’a une fois partagé une phrase qui m’a fait beaucoup de bien. C’est devenu un credo ou une ligne de conduite pour moi : “Sometimes you have to let go of the picture of what you thought life would be like and learn to find joy in the story you are actually living.”
Anne-Catherine, un mot pour finir ? Un message à passer ?
Dans la vie, comme dans un jeu de cartes, on ne choisit pas celles que l’on reçoit. Je tire souvent les mauvaises mais j’essaie, malgré elles, de sortir mon épingle du jeu.
Nous croisons tous nos doigts pour que cette FIV soit une réussite pour vous Anne-Catherine et Yannick. Vous le méritez ! Si vous avez besoin d’une oreille bienveillante ou de soutien, MotherStories est là. Si vous qui nous lisez souhaitez laisser un message à Anne-Catherine ou si vous voulez à votre tour partager votre histoire aux mamans de la communauté, contactez-nous .
Fertil-In
Fertil-In est un questionnaire intelligent permettant d’identifier d’éventuels obstacles à la fertilité. Adva Grundman, consultante en Fertilité et PMA et Virginie Terrier, nutritionniste et micro-nutritionniste, les fondatrices ont créé Fertil-In pour accompagner les couples dans leur désir d’enfant. Elles ont différents programmes qui ont toutes comme objectif d’améliorer la fertilité et la santé de manière générale des couples afin de mettre toutes les chances de leur côté dans leur projet de procréation, qu’elle soit naturelle ou médicalement assistée.
Après notre rencontre avec Anne-Catherine, nous l’avons mise en contact avec Fertil-In. Adva et Virginie lui ont proposé de leur offrir le programme inConcept pertinent à leur stade de PMA qui inclut la préparation du corps en vue d’une FIV.
Pour en savoir plus sur Fertil-In et ce qu’est l’intelligence fertile, découvrez cet article.
MotherStories dit :
Nous te souhaitons beaucoup de courage dans cette étape de ton parcours de PMA! On croise les doigts car tu le mérites!!! Natalie